Par Georges Patrick Junior Nzamba

Depuis les 5 et 6 octobre, le Gabon est en pleine période de sensibilisation en vue du référendum constitutionnel prévu dans les prochains jours. Ce processus, lancé par le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI), sans une annonce officielle, vise pourtant à réformer la Constitution et à consolider les bases d’une nouvelle ère politique dans le pays. La campagne a rapidement pris de l’ampleur, avec des arguments passionnés à la fois en faveur du « Oui », d’une part et du «Non», d’autre part. Révélant des divergences profondes au sein de la société gabonaise.

Les partisans du « Oui » : un espoir de renouveau institutionnel !

Les partisans du « Oui » au référendum considèrent cette nouvelle Constitution comme une chance historique de rebâtir les institutions du pays, après des décennies de gouvernance opaque. Selon le général Brice Clotaire Oligui Nguema, Président du CTRI, cette révision constitutionnelle «représente l’opportunité de restaurer la confiance des citoyens en l’État et ses institutions». Le texte proposé introduit des réformes destinées à renforcer l’équilibre des pouvoirs, garantir des élections transparentes et redéfinir les rôles des institutions comme la Cour constitutionnelle et le Parlement.

L’activiste politique Marc Ona Essangui, connu pour son combat contre la corruption et les abus de pouvoir, s’est également prononcé en faveur du «Oui». Sa position actuelle ne surprend personne ! N’est-ce pas qu’il est vice-président du Senat ? «Ce référendum est une chance pour le Gabon de se débarrasser définitivement des pratiques politiques dévoyées et de construire une démocratie plus représentative», a-t-il affirmé lors d’une récente manifestation à Libreville. Il a souligné que des dispositions sur la transparence électorale, la limitation des mandats et la décentralisation sont autant de points positifs qui méritent d’être soutenus.

D’autres figures politiques, comme le vice-Premier ministre, Alexandre Barro Chambrier, estiment que la nouvelle Constitution pourrait ouvrir la voie à une plus grande participation des citoyens aux décisions politiques. «C’est le moment de tourner la page des dérives du passé et de construire un Gabon plus juste et démocratique», a-t-il déclaré lors d’une rencontre avec des syndicalistes à Port-Gentil.

Les partisans du « Non »: crainte d’une manipulation du pouvoir

Cependant, le camp du «Non» est tout aussi vocal. Pour eux, cette révision constitutionnelle cache des intentions moins louables. Plusieurs activistes et leaders de l’opposition,  dénoncent une «réforme cosmétique» qui, selon eux, ne ferait que renforcer le pouvoir en place. «Ce référendum est une mascarade, une manière pour le CTRI de légitimer sa position sans apporter de véritables changements aux dysfonctionnements du système».

Les syndicalistes, notamment ceux du Syndicat des Travailleurs Gabonais (SYTRAGA), partagent cette position. Ils craignent que la nouvelle Constitution ne mette pas en place des mécanismes suffisamment solides, pour protéger les travailleurs et garantir leurs droits sociaux. «Rien dans cette nouvelle charte ne promet une amélioration concrète des conditions de vie des Gabonais. Elle se concentre uniquement sur la réorganisation politique, sans prendre en compte les besoins sociaux et économiques du peuple », a déploré un des leaders du mouvement, Jean Rémy Yama.

Les partisans du «Non» redoutent également que certaines clauses, telles que la prolongation du mandat présidentiel à sept ans, renouvelable, ne soient qu’un prétexte pour consolider le pouvoir des élites.

Un avenir incertain

La période de sensibilisation qui a eu lieu du 5 au 6 octobre montre un pays divisé, avec des visions radicalement différentes de l’avenir. Alors que les promoteurs du « Oui» y voient une occasion de refonder la République, les partisans du « Non » craignent qu’il ne s’agisse que d’une manœuvre politique de plus. Il est clair que ce référendum sera un moment crucial dans l’histoire récente du Gabon. Si le «Oui» l’emporte, le pays pourrait s’engager dans un nouveau chapitre institutionnel, avec la promesse d’une réforme plus démocratique et inclusive. Mais si le « Non » gagne, cela pourrait ouvrir la voie à une contestation politique plus forte et à une remise en question des méthodes du CTRI.

Les Gabonais sont ainsi confrontés à un choix délicat. Voter «Oui» signifie embrasser le changement avec l’espoir de réformes profondes, mais avec le risque de voir certains défauts du passé se répéter sous une nouvelle forme. Voter «Non» revient à refuser ce que certains considèrent comme une réforme de façade, tout en espérant une meilleure alternative.

Quoi qu’il en soit, le verdict des urnes déterminera non seulement la structure institutionnelle future du Gabon, mais aussi la stabilité politique du pays dans les années à venir.

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